4 juillet 2021 – Ouverts à l’inattendu de Dieu – Marc 6, 1-6 – B. Marchand

Texte biblique (Traduction Nouvelle Bible Segond)

Marc 6, v.1-6

1 Parti de là, [Jésus] vient dans son pays, et ses disciples le suivent. 2 Quand le sabbat fut venu, il se mit à enseigner dans la synagogue. Une multitude d’auditeurs, ébahis, se demandaient : D’où cela lui vient-il ? Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée ? Et comment de tels miracles se font-ils par ses mains ? 3 N’est-ce pas le charpentier, le fils de Marie, le frère de Jacques, de José, de Judas et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici, parmi nous ? Il était pour eux une cause de chute. 4 Jésus leur disait : On ne refuse pas d’honorer un prophète, sinon dans son pays, parmi les gens de sa parenté et dans sa maison. 5 Il ne pouvait faire là aucun miracle, sinon qu’il guérit quelques malades en leur imposant les mains. 6 Il s’étonnait de leur manque de foi.

Prédication

Tout commence ici par la stupéfaction. Le texte nous dit que de nombreux auditeurs de la synagogue, assemblés pour l’office du sabbat, sont ébahis quand ils entendent l’enseignement de Jésus. Ce n’est pas nouveau. L’étonnement, le trouble de la foule qui observe Jésus dans ses actes et ses paroles est régulièrement souligné dans les textes de l’évangile de Marc (2.12, 5.20, 5.42, 6.2, etc.) Par exemple, juste avant le récit que nous avons lu, le relèvement de la fille de Jaïros, qui était considérée comme morte, trouble fortement la foule. Les disciples sont eux-mêmes bien souvent étonnés de ce qu’ils voient ou entendent de Jésus.

L’étonnement génère de nombreuses questions sur Jésus. La communauté assemblée autour de Jésus ne comprend pas ce qui se joue en lui. À travers ses questions, elle reconnaît bien qu’en Jésus se manifestent une sagesse et une puissance. Le texte français parle de miracle, mais plus exactement, en grec, il s’agit d’actes de puissance, ce que le mot “miracle” ne traduit pas, car son étymologie latine se rapporte à l’étonnement, aux merveilleux, voire à l’étrange, mais pas à la puissance.

Ces actes de puissance, donc, et cette sagesse de Jésus sortent de l’ordinaire. Ils ne peuvent venir de Jésus lui-même. Ils lui viennent d’ailleurs, mais d’où ? “D’où cela lui vient-il ?”, dit l’assemblée. “Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée ?” Ce don reste incompréhensible.

L’assemblée elle-même révèle, à travers son questionnement, ce qui lui fait obstacle pour comprendre. Ce qui la piège, c’est sa proximité avec Jésus, car elle connaît Jésus. Enfin, elle dit le connaître.

En effet, elle est proche de lui déjà affectivement. Jésus est d’ici, sur la terre de ses pères, de ses ancêtres ; il est dans sa patrie. Sa famille est bien connue et habite “parmi nous”, près de nous, dit l’assemblée. Jésus est fils de ; ses frères et sœurs peuvent être tous nommés. Tout cela est bien défini. L’identité de Jésus est parfaitement maîtrisée. Elle lui trace ses contours, le cerne, lui impose un cadre, des limites. Même son métier : tout le monde sait que Jésus est charpentier. Il suffit de regarder ses mains ! Ses mains sont celles d’un charpentier, pas celles d’un sage ni d’un prophète, ni même d’un guérisseur. Alors, qu’est-ce qui pourrait bien échapper à cette maîtrise ?

Croire savoir, enfermer dans une identité est un piège, car, lorsque se révèle une part insoupçonnée de l’identité de Jésus, celle-ci devient insaisissable, incompréhensible.

Cela pourrait bien nous concerner aussi ! Beaucoup d’entre nous, ici, dans cette assemblée, connaissent Jésus, et même Dieu. Nous avons lu la Bible, si ce n’est en entier, au moins les récits les plus connus qui reviennent régulièrement dans le calendrier des lectures des dimanches. Nous connaissons trop bien ces textes bibliques, et nous risquons d’y projeter ce que nous pensons savoir sur eux. Oui, le piège de ne plus être à l’écoute du texte, mais d’y lire ce qu’il faut en dire, notre savoir sur le texte.

Nous nous représentons Jésus avec forcément telle ou telle capacité, tel ou tel trait de caractère, de sorte que celui que révèle le texte biblique est occulté. Nos fantasmes sur ce que doit être Dieu sont plaqués sur la personne de Jésus, tout comme peut-être ce qui nous reste en mémoire de ce que nous avons appris dans notre éducation religieuse, mais qui ne correspond pas tout à fait au texte biblique. Des images toutes faites de Jésus et de sa divinité. Le dogme que les croyants ont construit sur Dieu.

Tout cela nous rend Dieu et Jésus proches de nous, et nous laisse un sentiment d’être en terrain connu. Mais cette proximité apparente nous fait obstacle pour être touchés par la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.

Ce piège rend même la Bonne Nouvelle totalement impuissante : “[Jésus] ne pouvait faire là aucun [acte de puissance]”, écrit l’évangéliste Marc. La puissance devient impuissante.

Même Jésus s’en étonne ! Il ne s’y attendait apparemment pas. Il est surpris par le “manque de foi”. C’est même une absence de foi, de confiance, dont il est question. C’est de la non-confiance, en grec. Peut-être Jésus découvre-t-il lui-même les limites de sa puissance, car elle n’est agissante que dans la confiance qu’on lui accorde ?

Ce texte nous interpelle sur notre ouverture à la présence de Dieu et au surgissement des signes qui manifestent cette présence. Nous laissons-nous toucher par l’inouï de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ ? Nous laissons-nous surprendre par l’irruption de la parole de Dieu là où on ne l’attendait pas ? C’est bien cela, l’acte de puissance, le miracle qui est étonnement. L’inattendu de Dieu surgit dans mon existence pour la transformer en faveur de la vie. Dieu, lui, m’y attend. Amen !

 

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