14 mars 2021 – Le contentement – Philippiens 4, v.10-13 – M. Blanchard

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Le contentement

Ce dimanche matin, j’aimerai vous parler d’un sujet rarement abordé : le contentement, oui le contentement. Pourquoi en parler ? C’est un sujet de société toujours d’actualité.

Effectivement, nos sociétés occidentales, mais pas seulement, font tout pour faire de nous de grands insatisfaits. C’est l’objectif recherché par l’industrie publicitaire, qui nous pousse continuellement à l’achat en éveillant constamment notre insatisfaction. Alors nous voulons davantage, nous voulons mieux : plus d’argent évidemment, un plus grand écran, une voiture plus puissante, plus de confort, la 5 G et puis après la 6 G, bref plus de choses, toutes choses qui ne vont pas dans la lutte contre le réchauffement climatique, vitale pour l’humanité : on veut ce qu’on n’a pas. Et puis, comme chacun sait, le peuple français est réputé « râleur », moi-même je ne fais pas franchement exception, malheureusement. Râler, c’est exprimer son insatisfaction, bien sûr, et c’est un sport national : nous sommes si facilement mécontents de nos dirigeants et des décisions qu’ils prennent. Et puis, finalement, le contexte de la crise actuelle du Covid 19 est venu amplifier, exacerber ce mécontentement, cette insatisfaction chronique : ça ne va pas ; ça ne va jamais ; on veut plus ; on demande mieux… etc.

Il y a un passage, dans l’Épître de Paul aux Philippiens, qui aborde cette question. C’est un texte très étonnant parce que Paul a effectivement bien des raisons de râler puisqu’il est en prison. Et pourtant, au cœur de sa détresse, Paul dit là où il se trouve, toute la joie et le contentement parfait. Alors quel est son secret ?

Lisons ce texte pour nous en rendre compte… (Philippiens 4 v 10-13)

« Je me suis grandement réjoui, dans le Seigneur, de voir enfin refleurir votre intérêt pour moi. Cet intérêt, vous l’aviez bien, mais l’occasion vous manquait. 11 Je ne dis pas cela en raison d’un manque ; moi, en effet, j’ai appris à me contenter de l’état où je me trouve. 12 Je sais vivre humblement comme je sais vivre dans l’abondance. En tout et partout, j’ai appris à être rassasié et à avoir faim, à être dans l’abondance et à être dans le manque. 13Je peux tout en Celui qui me rend puissant. »

Paul est en prison (à Rome, ou ailleurs). Paul se réjouit de ce que les chrétiens de l’Église de Philippes, en Macédoine, ont décidé de lui envoyer un soutien financier bienvenu, parce que les prisonniers étaient à l’époque dépendants d’aides matérielles extérieures pour survivre dans leur cachot.

Mais ce qu’il faut savoir, c’est qu’il est certain que l’Église de Philippes était alors dans une situation financière difficile et qu’elle n’avait pas pu aider Paul autant qu’elle le souhaitait. C’est ce qu’on peut comprendre, entre les lignes, quand Paul dit que « Cet intérêt, vous l’aviez bien, mais l’occasion vous manquait. ». Donc, Paul se réjouit de ce soutien. En même temps, tout en disant sa reconnaissance pour le don qui arrivait, Paul veut prendre le temps de dire quelques mots sur le contentement. Il déclare :

« Je ne dis pas cela [sa joie, sa reconnaissance] en raison d’un manque ; moi, en effet, j’ai appris à me contenter de l’état où je me trouve. »

Sur cette question du contentement, quel est donc son secret ?

La première chose qui nous saute aux yeux dans ce que Paul écrit, c’est que le contentement, c’est quelque chose qui s’apprend. Paul dit bien « j’ai appris à me contenter de l’état où je me trouve » (v. 12). Notre inclinaison naturelle, en effet, c’est de vouloir plus, même si la satisfaction n’est que temporaire. Et l’apôtre Paul n’était pas différent de ça, mais il a appris autre chose. Il a appris à se contenter de l’état où il se trouve.

Paul nous donne une nouvelle définition du contentement. Parce que si nous sommes tous, par nature, de grands insatisfaits, c’est sûrement parce que nous nous faisons une mauvaise idée du contentement… D’ailleurs, que répondons-nous si on nous demande : « qu’est-ce qu’il faudrait pour que tu sois satisfait, content, heureux ? ». On égrène immanquablement, une liste de souhaits, de désirs : « meilleur travail ; meilleure vie, nouvelle moquette dans le salon. Pour Paul, le contentement : ce n’est pas recevoir ce que l’on veut mais l’inverse : vouloir ce que l’on reçoit. Eh oui ! Quand Paul disait se contenter de l’état dans lequel il se trouvait, ce qu’il voulait dire, c’est qu’il ne désirait pas autre chose, même si cet état en l’occurrence était la prison…

Remarquez que Paul souligne deux grands obstacles au contentement. Il dit :

« Je sais vivre humblement comme je sais vivre dans l’abondance. En tout et partout, j’ai appris à être rassasié et à avoir faim, à être dans l’abondance et à être dans le manque. »

Pour Paul, la pauvreté et la richesse ; le manque et l’abondance font tous deux obstacles au contentement. Nous, nous pensons que seuls la pauvreté et le manque font épreuve, et que l’abondance est plutôt un signe de bénédiction – mais ça, c’est parce que nous avons une mauvaise définition du contentement. Pour Paul, au contraire, le manque et l’abondance sont toutes deux des épreuves sévères pour l’humain, des épreuves qui peuvent dégrader, tordre et détruire…Je ne suis pas en train de dire que la pauvreté n’est pas difficile et qu’il ne faut pas venir en aide à ceux qui sont dans le besoin. Pas du tout, mais il faut savoir que l’abondance fait mal aux humains. Par exemple, l’abondance rend suffisant, elle rend fier. Elle donne le sentiment que l’on est autonome, que l’on n’a besoin de personne… Et ça, sur le plan spirituel, c’est délétère. Paul nous rappelle l’erreur de penser, qu’il vaudrait mieux être riche que pauvre, qu’il vaudrait mieux avoir que de manquer… Non, les deux font épreuve, et c’est pour ça que Paul dit qu’il a appris à se contenter, quel que soit l’état dans lequel il se trouve : « En tout et partout, j’ai appris à être rassasié et à avoir faim, à être dans l’abondance et à être dans le manque » (v. 12).

C’est pour ça que Paul dit au verset suivant : « Je peux tout en celui qui me rend puissant » ! :

Ce verset, soit dit en passant, est un des versets de la Bible les plus couramment sortis de son contexte. L’idée, ce n’est pas que grâce à Christ, on pourrait tout accomplir : gagner une épreuve sportive, réussir son examen, réaliser ses rêves les plus fous… Non, l’idée ici, c’est simplement qu’en Christ, on peut devenir suffisamment puissant pour vaincre l’épreuve du manque et l’épreuve de l’abondance. Qu’en Christ, il est possible d’être pleinement satisfait de son état, sans se résigner à ce que l’on a ou à ce que l’on n’a pas. L’essentiel n’est pas d’avoir, d’avoir ce que l’on n’a pas mais bien d’être, être.

On apprend le contentement quand on accepte que chacune des circonstances, « bonnes » ou « mauvaises », selon nos ressentis, nous sont données. C’est-à-dire quels sont les bons choix que Dieu nous inspire pour nos vies. Si Dieu a un plan pour sa création tout entière, alors je peux accepter chaque situation comme un don de sa part.

C’est un apprentissage, on apprend le contentement quand on sait dire : « Voilà ce que Dieu me donne aujourd’hui. Dieu me fait passer par l’abondance : « Merci Seigneur, je sais que c’est bon pour moi aujourd’hui ». Dieu me donne la pauvreté : « Merci Seigneur, je sais que c’est bon pour moi, aujourd’hui ». Il faut garder présent à l’esprit que Dieu n’est pas absent de nos épreuves. Au contraire, il est à l’œuvre dans nos vies. À travers ce que je traverse, le manque ou l’abondance, il veut me faire avancer, il veut me transformer à l’image de son fils. Il est à l’œuvre, je peux donc dire « oui, si c’est ce que Dieu veut pour moi ».

Ainsi avec son regard renouvelé, Paul a pu déclarer « Je peux tout en celui qui me rend puissant ». Au lieu de se lamenter en disant « Je ne peux pas » ou « je veux autre chose », Paul connait Dieu dans son amour, dans sa puissance, dans sa bonté. Il peut, lui Paul se contenter, en faisant pleinement confiance, de l’état dans lequel il se trouvait…

Si nous nous souvenons ainsi que « tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (comme Paul le dit par ailleurs), alors notre manière de voir la vie, de voir ses circonstances, sera tout autre. Cette foi va créer en nous une puissance qui nous rendra capables de vivre aussi bien dans le manque que de vivre dans l’abondance. Parce que, quelles que soient les circonstances, nous saurons que Dieu nous place là où il veut, et que c’est bien, que c’est bon. Et c’est ainsi que nous pourrons vouloir ce que nous avons, plus que de vouloir ce que nous n’avons pas !

N’oublions pas que ce qui nous rend capables d’être pleinement satisfaits, quelles que soient les circonstances, quelles que soient les épreuves, c’est Christ qui le donne : « je peux tout en Christ qui me rend puissant ». Et donc, le secret du contentement de Paul, c’est aussi cela : c’est avoir Christ dans sa vie et se satisfaire de Christ, faire de Christ sa satisfaction. Paul avait appris – face aux épreuves du manque et de l’abondance – que Christ était suffisant pour lui. Qu’en Christ, il a tout ce dont il a besoin pour traverser ces épreuves.

Et nous aussi : quand on connait Jésus-Christ, quand on connaît son amour, oui, on peut dire avec Paul : « Je peux tout en Christ qui me rend puissant ». En fait la puissance ne vient pas de nous, elle vient du Seigneur en qui l’on croit. Ce Seigneur, il est cet incomparable berger qui prend soin de nous, qui nous fortifie, qui nous vivifie.

Pour aller à l’essentiel… le secret du contentement, c’est la confiance.

Voilà. Paul n’avait qu’un seul message, finalement : Faites confiance à Christ, placez votre foi en lui. Vous pouvez surmonter vos épreuves, parce que ce qu’il vous donne de vivre, c’est ce qui est bon pour vous. Et vous pouvez être dans la joie, Christ, c’est la force et la joie, c’est la force de la joie, c’est la force invincible de la vie.

C’est cela le secret de Paul, c’est cela le secret de sa joie : quelles que soient les circonstances, nous pouvons faire confiance à Christ, parce qu’il nous comble de sa présence et de son amour.

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