5 décembre 2021 – Que votre amour abonde de plus en plus ! – Phil 1.v.4-11 – E. Marchand

Prédication

Le texte du jour que nous allons lire est tiré de l’épître (ou lettre) de Paul aux Philippiens. Paul écrit depuis la cellule d’une prison. Il envoie cette lettre pour soutenir et encourager la jeune communauté de Philippes, située en Macédoine du Nord, qu’il avait déjà eu l’occasion de visiter lors de ses précédents voyages. Écoutons le début de cette lettre et voyons comment ces paroles peuvent nous aider à affermir notre foi, près de 2000 ans plus tard.

4 Je ne cesse, dans toutes mes prières pour vous tous, de prier avec joie, 5à cause de la part que vous prenez à la bonne nouvelle, depuis le premier jour jusqu’à maintenant. 6Je suis persuadé que celui qui a commencé en vous une œuvre bonne en poursuivra l’achèvement jusqu’au jour de Jésus-Christ.
7 Il est juste que j’aie pour vous tous de telles pensées, parce que je vous porte dans mon cœur et que, dans ma condition de prisonnier comme dans la défense et la confirmation de la bonne nouvelle, vous avez tous part à la même grâce que moi. 8 Dieu m’est témoin, en effet, que j’ai une vive affection pour vous tous, la tendresse même de Jésus-Christ.
9 Ce que je demande dans mes prières, c’est que votre amour abonde de plus en plus en connaissance et en vraie sensibilité ; 10 qu’ainsi vous sachiez discerner ce qui est important, afin que vous soyez sincères et irréprochables pour le jour du Christ 11et que vous soyez remplis du fruit de justice qui vient par Jésus-Christ, à la gloire et à la louange de Dieu.
 

La première chose qui me frappe en lisant ce texte est le fait qu’il parle de joie, d’amour, d’encouragements. Et pourtant, Paul qui l’écrit est en prison. Il ne fait pas de cas de sa propre condition mais se concentre sur ce qu’il souhaite aux destinataires de sa lettre. Quelle capacité à faire abstraction de ses propres peines pour se concentrer pleinement sur les autres ! Quelle force de vie pour ressentir la joie et souhaiter l’amour alors que soi-même, on est privé de liberté et sans doute détenu dans des conditions très difficiles au quotidien ! Il est surprenant de penser qu’à l’inverse, nous qui sommes libres de nos mouvements et de nos pensées, nous sommes aussi paradoxalement enfermés ! Ne sommes-nous pas aussi en prison parfois ? Quand nos routines, nos principes, nos rancunes nous enferment et nous empêchent d’accueillir la vie ?… Souvenons-nous de Paul et de sa capacité à se réjouir pour les autres malgré ses propres malheurs. Il est en prison, mais il est libre dans son cœur.

Qu’est-ce qui le met ainsi en joie ? Verset 5 : « à cause de la part que vous prenez à la bonne nouvelle, depuis le premier jour jusqu’à maintenant ». Il affirme que chacun participe à la diffusion de la Bonne nouvelle alors que dans la suite de l’épître, à plusieurs reprises, Paul donne des conseils et des consignes pour « se conduire d’une manière digne de la bonne nouvelle de Jésus-Christ ». Sans doute les Philippiens n’étaient-ils pas si exemplaires ! J’en retiens que même s’ils ne sont pas parfaits dans leur façon d’être chrétiens, Paul exprime la joie, la reconnaissance et aussi la confiance qu’ils ont tous un rôle à jouer, malgré leurs errements, leurs doutes, leurs difficultés. La foi et le fait d’être chrétiens ne sont pas des réalisations figées mais les Philippiens, et nous aussi, sommes dans une progression constante « jusqu’au retour de Jésus-Christ » nous dit le texte. Dieu continue d’œuvrer en nous pour nous faire progresser.

C’est valable pour nous aussi. Nous sommes toujours en chemin pour garder vivante et libératrice cette relation à Dieu. Ne considérons pas que des années de catéchisme (souvent lointaines), qu’une confirmation ou un service dans l’Église soient acquis pour toujours. Nous sommes appelés à réinterroger notre foi et à la faire fructifier tout au long de notre vie. La lecture quotidienne de la Bible, la prière personnelle et le culte du dimanche peuvent nous aider en cela. Soyons à l’écoute quand Dieu nous parle car il veut agir dans nos vies. Sachons le reconnaître dans celui qui souffre, qui a besoin de réconfort.

Pour les Philippiens, cet appel à participer à la diffusion de la Bonne nouvelle ne se limite pas non plus aux offices. Ce n’est pas une théorie abstraite, détachée de la vie quotidienne. C’est un engagement concret pour soulager Paul puisqu’ils ont envoyé Epaphrodite, un membre de la communauté pour subvenir aux besoins de Paul emprisonné. A cette époque (et dans de nombreux pays aujourd’hui encore), ce sont les familles et les proches qui devaient assurer la subsistance des détenus.

Du fond de sa cellule, Paul se dit participer au don reçu de Dieu. Malgré sa condition et son enfermement, il prend part à ce réseau de diffusion des dons de Dieu. Chacun a un rôle à jouer, quelque soit son lieu de vie, sa situation, son degré de connaissance théologique. Ce qui compte, c’est d’agir selon ses talents, là où nous sommes et d’être en relation les uns avec les autres par la prière, par les envois de lettres (comme cette Epître), par l’envoi de messagers.

Quelle est la recommandation de Paul aux Philippiens pour prendre part à la Bonne nouvelle de Dieu ? Concrètement, que doivent-ils faire ? Au verset 9 : « Ce que je demande dans mes prières, c’est que votre amour abonde de plus en plus en connaissance et en vraie sensibilité ». Il est frappant de noter que pour Paul, c’est l’amour qui doit grandir, pas la seule foi. L’amour est la partie visible de la foi, la traduction concrète, comme l’évoque si bien la première épître aux Corinthiens, chapitre 13 « Maintenant ces trois choses demeurent : la foi, l’espérance et l’amour ; mais la plus grande, c’est l’amour » !

Ce n’est pas non plus la connaissance intellectuelle mais l’amour du cœur, le siège de nos émotions, de nos tripes. Tous les humains ont des émotions. Tous peuvent recevoir l’amour de Dieu et le partager, ce n’est pas une question de capacité physique ou intellectuelle.

La suite du verset nous dit à quoi sert cet amour : « Qu’ainsi vous sachiez discerner ce qui est important, afin que vous soyez sincères et irréprochables pour le jour du Christ et que vous soyez remplis du fruit de la justice qui vient par Jésus-Christ ». Cet amour nous sert à discerner, ordonner, trier le vrai du faux.

Ce qui est important aux yeux de Dieu, c’est justement de choisir d’aimer. Cet amour est comme la clé pour comprendre le monde autrement. Nous sommes nous aussi invités à mettre de l’ordre dans notre vision du monde par le filtre de l’amour « agapè », et pas par nos acquis culturels ou nos conventions sociales « ça ne se fait pas… ». L’amour doit remplacer la peur qui nous saisit parfois et nous fait ériger des murs plutôt que des ponts, qui nous fait détourner le regard de ce qui nous dérange plutôt que de tendre la main.

C’est aussi en nous-mêmes que nous sommes appelés à mettre de l’ordre, à appliquer le filtre de l’amour charitable, à poser un regard d’amour et de bienveillance sur nous-mêmes. Comme le disait Martin Kopp lors de la conférence qu’il a tenue il y a 10 jours à Niort, nous sommes aussi création de Dieu. Il n’y a pas que les éléments naturels qui nous entourent. Alors prenons soin de nous et exerçons notre cœur à s’ouvrir à cet amour pour mieux accueillir Jésus-Christ dans nos vies. Nous serons alors « remplis du fruit de justice » dit le verset 11 et nous serons ajustés à lui dans chaque geste, chaque pensée, chaque élan de notre cœur. Amen.

 

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Enregistrer

Contact